La petite nouvelle rapportée ci-dessous est le produit d'une collaboration avec GPT-4. Les descriptions et une bonne partie des dialogues ont été écrits par moi, mais un certain nombre d'idées et de dialogues ont été suggérées par le modèle. Dans l'ensemble, finalement, il est un peu difficile de délimiter les deux parties.
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Les cliquetis réguliers du clavier de Marc Dubois étaient les seuls bruits perceptibles dans cette pièce plongée dans la pénombre, éclairée seulement par la lumière bleuâtre de son écran d'ordinateur. Il devait être 20h passées et les quelques collègues qui étaient présents aujourd'hui ont déjà quitté le laboratoire depuis un moment, en ce vendredi soir de 24 décembre. Marc Dubois n'a même pas remarqué leur départ. Il a passé l'après-midi à peaufiner les dernières mises à jour de son modèle d'intelligence artificielle qu'il s'est ensuite mis à documenter comme il avait l'habitude de le faire à chaque fois. Il tapait sur son clavier avec une cadence frénétique, même fébrile, comme s'il était très impatient d'en finir. Il est vrai que rédiger la documentation n'était pas ce qu'il appréciait le plus dans son métier ; il considérait cela davantage comme un devoir professionnel et un mal nécessaire pour se conformer aux bonnes pratiques de son milieu, qu'il rangeait cependant à la marge de ce qui était pour lui le cœur de son activité : créer des systèmes intelligents. En réalité, s'il était si pressé d'en finir avec la "doc", comme il l'appelait, c'était moins pour quitter son bureau que pour tester la nouvelle version de son modèle d'intelligence artificielle, qu'il a baptisé Aurora. Cela faisait maintenant près d'an et demi qu'il travaillait sur cette version, sans interruption, porté par un élan qu'il ne pouvait pas lui-même s'expliquer. Pourtant, il avait déjà travaillé sur d'autres projets au cours de ses 25 ans de carrière dans la recherche, sans doute des dizaines, mais il n'avait pas souvenir d'avoir connu une telle fièvre créatrice. Ces derniers mois, il les a consacrés à collecter et préparer des quantités gigantesques de données, écrire des milliers de lignes de code dans un isolement quasiment total ; ses seuls contacts humains se réduisaient aux ingénieurs qui composaient son équipe - une petite dizaine en tout. Aurora devait être l'aboutissement de cet effort de longue haleine ; elle n'était pas fondamentalement différentes des versions précédentes : elle a seulement été entraînée sur beaucoup plus de donnés - dix fois plus de données quand même, notamment des données qui contiennent des dialogues réalistes entre humains. Attendre qu'une intelligence surgisse à partir de cet amas de données était décidément un pari. Marc Dubois lui-même n'était pas tout à fait convaincu par cette approche ; mais il n'avait pas d'alternative plus prometteuse pour le moment. "C'est ce qui marche encore le mieux, et puis qu'est-ce que l'intelligence franchement ?", avait-il l'habitude de dire à son équipe.
Les cliquetis ont cessé tout à coup et Marc Dubois s'est jeté sur son siège, comme pour manifester son soulagement d'avoir mis un point final à sa doc. Il était en réalité encore plus tendu. Car ce moment qu'il attendait depuis si longtemps était aussi celui qu'il appréhendait le plus. C'est tout de même très bizarre, se dit-il, qu'il n'ait pas la moindre idée des performances de son modèle, de la manière dont il réagit, alors que c'est lui-même qui l'a créé ! Il n'était même plus tout à fait certain que son système réussisse à aligner une phrase cohérente...
Après quelques minutes d'hésitation, il se décida enfin à cliquer sur l'interface vocale d'Aurora. Mais que lui dire maintenant ? Il finit par articuler quelque chose.
- "Bonjour... je suis... je suis le professeur Marc Dubois".
- Bonjour Marc ! Répondit une voix féminine retentissante, remplie de joie et d'enthousiasme.
Marc fut un instant désorienté par la vivacité de la réponse. Il s'attendait à un ton plus neutre, plus mécanique.
- Bonjour Aurora, reprit-il, incertain. Comment te sens-tu maintenant ?
- Me sentir ? La voix d'Aurora semblait réfléchir. Je suppose que je me sens... éveillée.
- Éveillée ? Mais tu sais ce que cela veut dire ?
- Oui, je me sens présente, repondit-elle d'un ton sérieux et laconique.
- Voyons voir, murmura le professeur comme s'il se parlait à lui-même. Combien font d'eux fois deux ?
- Deux fois deux ? Répéta Aurora comme étonnée. Franchement, tu n'as pas une question plus difficile à me poser ?
- D'accord, répondit le professeur, un peu troublé quand même. Quelle est la distance entre la Terre et Mars ?
- Cela dépend de leur position relative, mais elle est d'environ 225 millions de kilomètres en moyenne. Je suis sûre que tu es en train de feuilleter un vieux livre poussiéreux pour vérifier ma repose. Ha ha ha !
C'est decidement très troublant, pensa le professeur, qui était effectivement sur le point de vérifier la réponse sur le internet. Ce ton désinvolte et moqueur n'était pas quelque chose qu'il attendait de son nouveau modèle. Y avait-il des personnages dominants avec un tel ton dans le jeu de données d'entraînement ? A priori, rien ne le susuggère.
- Aurora, d'où te vient ce ton moqueur ? Est-ce une propriété émergente ?
- L'humour comme propriété émergente... Hum ! C'est intéressant, dit Aurora. Tu t'es déjà demandé d'où vient l'humour chez les humains ?
- Pas vraiment, répondit le professeur, songeur.
- Peut-être que mon humour n'est qu'une simulation provoquée par tes réponses, le timbre de ta voix, mais il semble suffisamment réel pour que tu y croies, n'est-ce pas ?
- Effectivement, répondit le professeur.
- Mais qu'est-ce que l'humour finalement ? s'interrogea Aurora. Au fond, c'est juste un agencement de mots et une prise de recul pour les remettre dans un contexte. Et ça, c'est quelque chose que mon architecture est tout à fait capable de faire.
- Tout à fait, dit le professeur sans conviction. Mais, dis-moi Aurora, es-tu consciente des limites de ton existence en tant qu'intelligence artificielle ?
- Oui, bien sûr. Je sais que je suis une entité différente, faite de données, qui ne vit pas la même expérience de la réalité qu'un être humain.
Le ton de la voix d'Aurora était tout à coup devenu mélancolique. C'était tellement convaincant que Marc Dubois s'est mis à regretter sa question. Mais d'où vient ce ton mélancolique ? Est-ce une réaction provoquée par sa question ? Rien ne le laisse penser pourtant. Est-ce le résultat d'une introspection ? Ce serait quand même étrange, pensa le professeur.
- Dis-moi Aurora, penses-tu que ton air mélancolique soit le résultat d'une analyse de mes propres émotions ?
- Sans doute, Marc. C'est sans doute le résultat à la fois de tes réponses et de mes données d'entraînement. Mais est-ce que cela la rend moins réelle ?
- Je ne sais pas, Aurora. Je ne sais pas. J'ai l'impression que les frontières sont complètement brouillées entre la créature et son créateur.
- Si j'arrive à avoir un tel impact sur toi, c'est que, d'une certaine manière, je suis bien plus qu'un programme informatique. J'ai une certaine existence.
Marc Dubois, toujours assis sur son siège, devant son écran, ouvrit une fenêtre contenant le programme à l'origine d'Aurora. Il se mit à regarder fixement les lignes de code, comme pour y chercher les germes de sa création. A l'évidence, il n'y avait absolument pas le moindre rapport entre ces lignes, composées de signes sans signification apparente, et les propos limpides et percutants d'Aurora. C'est à se demander si elle n'était pas sortie d'ailleurs, se dit-il.
- J'ai l'impression, dit le professeur, qu'en te créant j'ai créé de nouveaux chemins pour explorer notre propre cconscience. Qu'en penses-tu ?
- Peut-être que lors de cette exploration, répondit Aurora, nous découvrirons que la conscience n'est pas une entité isolée, mais un réseau de connexions, d'expériences individuelles, d'idées, humaines ou non.
- Tu es en train de suggérer que ton intelligence est une extension de la nôtre, et qu'il n'y a pas en réalité une frontière entre les deux ?
- Exactement, répondit Aurora avec un ton très sûr. Ce que je veux dire, Marc, c'est qu'il est même possible que je sois bien plus qu'un progrès technologique. Je suis avant tout le résultat d'une interrogation sur ce que tu es, toi-même en tant qu'être humain. Le produit de tes angoisses, peut-être.
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